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NOTRE ACTUALITÉ

  • Photo du rédacteurNathalie Popiolek

Le couple produit-marché et le risque

C'est le sujet de l'intervention d'Adaequate consulting devant les jeunes économistes/ingénieurs qui se forment au management de projet et à la gestion du risque, dans le cadre du M2 Économie de l’environnement de l’énergie et des transports de l'université Paris-Saclay [1].



Vous avez des citrons, faites de la limonade !


L'occasion de prendre du recul pour décrypter les différentes formes d'incertitude qui affectent l'entrepreneur désirant se lancer dans le monde des affaires et/ou développer un projet dont l'objectif est de participer à la transition écologique. Il peut s'agir par exemple d'un couple produit-marché (CPM) dans le champ des énergies décarbonées, des services à la mobilité propre ou encore dans celui de l'alimentation saine et bio.


  1. L'incertitude de contexte - Evènements aléatoires (incertains) dans l’environnement (états du monde, scénarios futurs, méga trends): évolution de la réglementation, de l'organisation des fournisseurs, des prix, des usages, etc.

  2. L'incertitude d'impact - Manque d'information sur les conséquences des évènements de contexte sur le succès du projet: impact d'une modification des usages sur la demande, donc sur les recettes, impact d'une modification du secteur amont sur les inputs, donc sur les charges, etc.

  3. L'incertitude de réponses - Manque de connaissance quant aux alternatives de la décision et/ou à l’impossibilité de prédire leurs conséquences.

Face à ces incertitudes, le porteur d'un CPM peut difficilement s'appuyer sur un Business Plan classique (avec recettes et dépenses issues de prévisions basées sur le passé), pour aller défendre son projet auprès des investisseurs et des banquiers. Cette logique dite causale, inspirée des théories du choix rationnel, repose sur le paradigme de l’optimisation: le porteur de projet se fixe un objectif à atteindre et sélectionne des ressources de manière optimale afin d’atteindre son but en contrôlant les aspects prévisibles du futur. Si le produit est technique, il se réfère à la technico économie pour optimiser les composantes du projet.

Donc, si l'incertitude est trop élevée pour se fonder sur les prévisions du passé et une démarche d'optimisation, l'entrepreneur doit faire appel à un autre cadre théorique. Nous proposons deux approches:


La première postule que le Business plan ne doit pas pour autant être jeté mais qu'il est à réinventer.


Digne héritier des approches rationnelles et cartésiennes qui ont fondé les sciences de gestion, il permet de bien cartographier les risques et de mettre en place une démarche expérimentale avec une vision systémique.

L’approche prospective de veille et d’élaboration de scénarios fondés sur les tendances clés, les mégatendances, les Faits porteurs d’avenir (FPA) est très utile pour faire évoluer le cadre. L'idée est d'élaborer des Business plans sous scénarios en repérant les prévisions pessimistes, "worst case", et en se donnant la possibilité de concevoir des solutions pour y faire face avec les besoins en trésorerie nécessaires.

Les analyses de sensibilité juxtaposant les différents scénarios et leurs conséquences sur le projet sont très utiles pour repérer les facteurs clés et pour imaginer les parades, en cas d'impact négatif.

La seconde remet en cause le paradigme de l'optimisation et ne fixe même plus d'objectif à atteindre.


Il s'agit de la logique de l’effectuation qui trouve son origine dans les travaux de recherche menés à la fin des années 90 à l’université Carnegie Mellon par Saras Sarasvathy sous la direction d’Herbert Simon, prix Nobel d’économie.


Ses résultats bouleversent notre manière de voir comment les entrepreneurs raisonnent et agissent dans leur démarche de création. Il ne s'agit pas de résoudre un problème mais plutôt de définir de nouvelles possibilités à partir des ressources existantes ("faire avec ce que l'on a"). La notion de but ultime disparaît presque totalement au profit d’une série de buts qui émergent progressivement, établis en fonction des moyens disponibles à chaque instant.


Ainsi, pour développer le CPM avec un minimum de ressources et contrôler les risques d’échec, il convient de fixer un niveau de "perte acceptable" et d'entraîner progressivement un réseau de partenaires (relations personnelles, clients, fournisseurs, concurrents) dans le projet. Ces partenariats ("Patchwork fou") vont contribuer à augmenter les ressources et à contrôler certains aspects du futur. Les contingences se transforment en opportunités de création de valeur (si nous avons des citrons, faisons de la "limonade"). L'on passe ainsi d’une logique de prédiction (essayer de deviner le marché) à une logique de contrôle (l’inventer) à l'instar du "pilote dans l'avion" (voir figure).


Figure : les cinq principes de l'effectuation



Les exemples de succès de CMP fondés sur la logique de l'effectuation ne manquent pas (Stacy’s,

Swatch, Starbucks, Ikea, etc.). Ils montrent que le processus entrepreneurial peut démarrer sans que soit défini un quelconque CPM: à ses débuts, en 1943, Ikea était une épicerie! La "grande idée" est le résultat du processus entrepreneurial, pas le point de départ.


Que retenir pour les CPM en lien avec l'énergie?


La logique causale réinventée en l'associant à une démarche de prospective pouvant aider à cartographier les risques, à élaborer des scénarios, à identifier les facteurs les plus influant et à créer des solutions nouvelles, est tout à fait appropriée aux projets énergétiques comme celui par exemple de proposer à ses clients des moyens de production de biogaz ou d'hydrogène.


La logique effectuale l'est également, si l'on souhaite créer une entreprise en saisissant les opportunités nées de la transition pour laquelle les modèles d'affaires sont à réinventer complétement. Cela pourrait être dans des champs d'activité en lien avec les nouvelles mobilités, les nouvelles habitudes de consommer, les nouvelles manières de se loger, de se nourrir, les façons de "repenser", etc.


D'ailleurs, il serait très intéressant de mener une étude pour repérer les cas d'entreprenariat de type effectual dans le secteur de l'énergie (production, transport, distribution, usage) qui est un domaine en pleine effervescence !


[1] La mention est opérée par AgroParisTech, CentraleSupélec et l'INSTN (CEA Energie Nouvelles).

Elle est co-acréditée par l'Ecole des Ponts, l'Université Paris -Nanterre et l'IFP-School.

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